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24.01.2013

L’évêque et le séminariste (1/2)

« GENERATIONS CROISEES »

Deux anciens, que séparent une ou deux générations, mais qui ont choisi la même voie.

Mgr Laurent Dognin a été élève de la 6ème à la Première à Stanislas (1964-1970). Etudiant au Séminaire Saint-Sulpice, il est ordonné prêtre le 15 juin 1980 pour le diocèse de Nanterre. Vicaire à Levallois-Perret et à Asnières, curé à Asnières puis à Neuilly, il est nommé vicaire général du diocèse en 2006. Par ailleurs, il a été responsable régional du FRAT et responsable européen de la Fraternité Sacerdotale Jesus Caritas. Sacré évêque le 27 février 2011, il est nommé évêque auxiliaire du diocèse de Bordeaux, auprès du Cardinal Jean-Pierre Ricard.

Monseigneur, quel a été votre parcours au Collège Stanislas ? Quel souvenir en conservez-vous ?
Je suis entré en 6ème au collège Stanislas. C’était l’année 1964-65. Ce ne fut pas un parcours facile pour moi car nous étions une famille de 6 enfants et nos parents avaient du mal à suivre notre scolarité. J’ai redoublé ma 6ème et j’ai continué en étant assez moyen jusqu’en Seconde (année 1969-70). Le directeur m’a fait comprendre alors qu’un changement d’établissement serait profitable… j’ai quitté alors Stanislas pour faire ma Première et ma Terminale au Lycée Notre Dame de Boulogne. Avec le recul, je reconnais que ce fut une bonne décision car je me suis mis à travailler sérieusement et j’ai pu avoir mon Bac C. C’est pourquoi je ne peux pas dire que je suis de la promotion 72 de Stanislas puisque j’ai quitté l’établissement avant le Bac mais je suis resté tout de même 6 ans dans l’établissement ! Comme vous l’avez compris, mon parcours n’a pas été très brillant mais j’ai aimé Stanislas parce que j’ai pu y trouver les éléments pour vivre mon adolescence dans les meilleures conditions possibles. J’y ai reçu des repères solides qui m’ont aidé à me construire humainement et spirituellement.

Quelles sont pour vous les particularités de Stanislas (et/ou de l’enseignement catholique) dans sa manière d’enseigner et d’éduquer ?
Je ne connais pas les particularités de Stanislas aujourd’hui. Quand j’étais élève, l’établissement n’était pas mixte. Il n’y avait que des garçons et, pour ma part, j’ai apprécié cela car les rapports entre nous étaient plus clairs, même s’ils pouvaient être aussi parfois conflictuels ! J’ai vu que ce choix était possible aujourd’hui et c’est une bonne chose.
J’ai apprécié les professeurs que nous avons eus. C’étaient de bons éducateurs. Je me souviens avoir été choqué cependant par un professeur de français en Seconde qui affichait assez clairement ses idées anticléricales. Je trouvais cela incongru dans un établissement catholique mais les événements de mai 1968 étaient passés par là et toutes les institutions étaient systématiquement remises en cause. Ce défi existe encore !
Sur le plan de l’éducation chrétienne, je garde un souvenir mémorable de mon année de 6ème. J’ai été profondément marqué par notre aumônier le père Robert Rinetti. C’était un jeune prêtre qui m’a vraiment aidé à aimer le Seigneur. La profession de foi le 5 juin 1965 dans l’église St Sulpice restera à jamais dans ma mémoire. Il a aussi marqué Benoît Rivière, qui était dans la même classe que moi (6ème 1) et qui est aujourd’hui évêque d’Autun, Châlon et Macon.
D’une façon générale, dans l’Enseignement Catholique, il me semble important de permettre à tous les élèves, croyants ou non, chrétiens ou non, de connaître la Bonne Nouvelle de Jésus Christ. Libre à eux ensuite de s’engager davantage. Il faut aussi pouvoir répondre aux questions des jeunes, leur donner des repères solides et ne pas tomber dans le relativisme où la vérité est subjective et déterminée par chacun.

Comment pourriez-vous aider votre ancien Collège ?
A partir de mon expérience personnelle, il me semble essentiel d’aider les jeunes qui ont des difficultés scolaires. Il y a ceux qui ont des incapacités et il faut les aider, voire les réorienter si besoin vers des formations adaptées. Mais il y en a d’autres qui ont de bonnes capacités mais qui n’ont simplement pas les conditions familiales favorables d’un travail. Si le jeune ne veut pas travailler, c’est autre chose ! Un collège catholique doit pouvoir aider les jeunes à s’en sortir. Ce n’était pas le cas lorsque j’étais au collège mais aujourd’hui j’ai vu qu’il y avait des initiatives en ce sens.

Avez-vous une ou des anecdotes à rapporter ?
En 6ème et 5ème, nous étions encore dans les anciens bâtiments et nous avons pu voir se construire le nouveau collège sur pilotis. Nous étions très impressionnés par ce chantier qui se développait mois après mois devant nos fenêtres. Je me souviens encore parfaitement de la construction des gros piliers avec leur forme si particulière qui nous intriguaient beaucoup. L’entrée en 4ème se fit dans le bâtiment flambant neuf. Nous étions fiers d’être dans cet établissement ultra moderne où il y avait une télévision dans chaque classe ce qui était vraiment nouveau à l’époque. Nous avons assisté alors à la démolition de notre ancien collège… autre spectacle !
Je me souviens aussi qu’en mai 1968, la « Révolution » sévissait dans les rues avoisinantes. L’établissement ferma ses portes pendant trois semaines. Comme élèves nous étions assez contents de ces vacances imprévues (j’avais 15 ans !) mais tout de même angoissés par la violence qui se déchainait, les grèves, la contestation partout, un pays qui s’était complètement paralysé. L’avenir était sombre ! Je faisais partie d’un groupe qui priait le chapelet pour que la « révolution » s’arrête… fin juin, nous étions exaucés !

Pourriez-vous résumer votre parcours ?
Après mon ordination presbytérale qui eut lieu le 15 juin 1980, j’étais nommé vicaire à Levallois-Perret où je me suis beaucoup occupé de la pastorale des jeunes mais également de ministère paroissial auprès des adultes. Au bout de 6 ans, l’évêque m’envoyait à la paroisse Ste Geneviève d’Asnières où je suis resté 11 ans (5 ans vicaire puis 6 ans curé). En 1997, j’étais nommé à Neuilly-sur-Seine, curé de St Pierre et de St Jacques et doyen pour l’ensemble de la ville. J’y suis resté presque 9 ans puisqu’en janvier 2006, je fus nommé vicaire général du diocèse pour succéder à Mgr Michel Pansard qui venait d’être nommé évêque de Chartres. En plus de ces charges j’ai fait partie de l’équipe dirigeante du Fraternel de Lourdes en 1988 et 1990. J’ai également eu des responsabilités dans la Fraternité sacerdotale Jésus Caritas pour l’Ile de France et la Haute Normandie pendant 6 ans et responsable européen pendant un peu plus de 3 ans jusqu’à ce que je sois nommé évêque.
Je dois dire que j’ai toujours été vraiment heureux d’être prêtre et de tous les ministères qui m’ont été confiés.
Le 5 janvier 2011, je fus donc nommé évêque auxiliaire de Bordeaux et consacré le 27 février 2011 dans la cathédrale de Bordeaux par le cardinal Jean-Pierre Ricard avec qui je partage maintenant le ministère épiscopal dans le diocèse de Bordeaux.

Quelles sont les figures qui guident votre vie ?
Je dois d’abord dire que mes parents m’ont beaucoup aidé à grandir dans la foi. Ils avaient l’un et l’autre des sensibilités assez différentes. Papa avait une foi plus traditionnelle et maman plutôt charismatique et œcuménique, mais ils aimaient profondément le Christ et la cohérence entre leur foi et leur vie m’ont marqué. Il arrivait qu’en rentrant le soir à la maison, maman ait invité une personne sans domicile fixe à se joindre à ses six enfants pour le dîner et d’autres attitudes semblables.
Il y a aussi des figures de saints qui me stimulent. Ste Thérèse de l’enfant Jésus dont j’ai lu pour la première fois « histoire d’une âme » durant mon service dans la chambrée militaire ce qui avait provoqué quelques réactions étonnées de mes compagnons d’arme ! St Jean-Marie Vianney que j’ai médité lorsque j’étais curé de paroisse ou Charles de Foucauld qui m’a stimulé dans ma vie de prière et d’adoration mais également dans l’attention aux plus « petits » et à ceux qui sont loin de la foi.
Le bienheureux pape Jean-Paul II m’a aussi beaucoup marqué. Il est venu à Paris en 1980, deux semaines avant mon ordination presbytérale. Lors de sa visite au séminaire, nous avons eu l’occasion d’échanger longuement avec lui. Son appel à ne pas avoir peur de vivre et de témoigner de sa foi m’a encouragé dans ma vie de prêtre. Il a fait entrer l’Eglise dans une manière plus décomplexée de vivre sa foi et cette intuition continue de m’habiter aujourd’hui. Il nous a fait comprendre qu’il fallait sortir de l’enfouissement pour témoigner de la Bonne Nouvelle auprès de ceux qui l’ont délaissé ou qui ne le connaissent pas encore. Le pape Benoît XVI va aussi dans ce sens en encourageant les baptisés à une Nouvelle Évangélisation. C’est le grand défi de notre siècle qui commence.

Qu’est ce que la vocation sacerdotale ? Que confère l’épiscopat ?
D’abord ce n’est pas un métier. Vu mon parcours scolaire moyen, je me destinais plutôt à un métier technique dans la thermodynamique. Au séminaire, il y a des médecins, des ingénieurs, des techniciens, des comptables. C’est le Seigneur qui appelle. Le choix de devenir prêtre est donc en fait une réponse à cet appel plein d’amour du Seigneur. Quand on en prend conscience, la réponse vient naturellement. Mais pour cela, il faut avoir une vie de prière, une fidélité à la messe du dimanche, une vie chrétienne tout simplement et un cœur disponible…
Ensuite c’est à l’Eglise de discerner si cet appel vient vraiment du Seigneur.
En revanche, la demande pour devenir évêque ne peut pas venir de nous. Nous pouvons bien entendre des fidèles ou même des confrères prêtres nous dire que nous sommes faits pour l’épiscopat, mais ces voix sont comme des sirènes pouvant éveiller en nous des ambitions malsaines. Le discernement se fait indépendamment du prêtre, dans le plus grand secret, afin de respecter sa liberté totale jusqu’à l’appel éventuel. Sans entrer dans les détails, le processus est long avant que le Nonce Apostolique (représentant du pape dans le pays) envoie à Rome les noms des candidats parmi lesquels sera choisi celui que le pape nommera.
En ce sens, on peut parler de Vocation car c’est bien le Seigneur qui appelle par le discernement et le choix de l’Eglise mais il y a toujours la liberté de refuser car il n’y a pas d’appel du Seigneur sans une réponse libre dans la foi. Et c’est bien dans cet état d’esprit, dans la foi et la confiance, que j’ai accueilli la demande que m’a faite le Nonce à devenir évêque auxiliaire de Bordeaux.

Quelles ont été les étapes de votre discernement ?
C’est vers l’âge de 8 ans que j’ai exprimé à mes parents mon désir de devenir prêtre. Je me souviens encore de ma prière de ces années là où je disais au fond de mon cœur « Seigneur faites que je sois prêtre ». En 6ème j’en ai parlé au père Robert Rinetti, mon aumônier de Stanislas, car je voulais savoir comment je pouvais être sûr que c’était bien le Seigneur qui m’appelait. Il me répondit alors « Si tu es profondément dans la joie à l’idée d’être prêtre, c’est peut-être le signe que le Seigneur t’appelle ». Ce conseil d’inspiration ignatienne m’a habité durant toute ma jeunesse. J’avoue avoir été pourtant dans le brouillard durant les années d’adolescence même si j’ai toujours été fidèle à la messe dominicale. Je me suis posé la question du mariage, de fonder une famille. Mais un soir de mai 1973 j’ai été inondé de joie et j’ai vu clairement que c’était bien le Seigneur qui m’appelait à devenir prêtre et que je trouverai là le bonheur de ma vie. J’ai dit OUI ce soir là et je ne l’ai jamais regretté, bien au contraire. L’année de service militaire comme chef de groupe commando dans le 23ème RIMA m’a permis de murir et confirmer ce choix et je suis entré au séminaire St Sulpice à Issy-les-Moulineaux en octobre 1974 pour être ordonné prêtre en 1980.

Qu’est-ce que la Fraternité Sacerdotale Jésus Caritas ?
C’est une association qui rassemble des prêtres dans la spiritualité du bienheureux Charles de Foucauld. Les prêtres se retrouvent chaque mois pendant 24 heures au sein d’une fraternité de 5 ou 6 membres. Ils sont invités à prendre personnellement une journée de désert chaque mois, à prendre un temps pour l’adoration eucharistique si possible chaque jour, un temps de retraite au moins chaque année, de méditer l’Evangile de façon prolongée. Mais c’est aussi un appel à devenir « frère universel » comme Charles de Foucauld nous en a montré le chemin, sans faire de différence entre les personnes. Imiter Jésus dans son abaissement lorsqu’il a lavé les pieds de ses disciples. Se faire le serviteur de tous… Il y a dans cette Fraternité plus de 650 prêtres en France et plus de 4000 dans le monde.

Pourriez-vous décrire la fonction d’un évêque ?
L’évêque est le successeur des apôtres. Je l’avais appris au catéchisme comme tout le monde mais j’en ai pris vraiment conscience en entrant moi-même dans cette succession. J’entends cette parole de Jésus à Pierre : "Pierre, m’aimes-tu plus que ceux-ci ? - Oui Seigneur, tu sais que je t’aime - Sois le berger de mes brebis" Jn 21,15. Comme Pierre, nous sommes donc les bergers en son nom mais ce sont toujours les brebis du Seigneur ! C’est lui, Jésus, qui reste le Pasteur, la "Tête de l’Eglise" comme le dit St Paul. C’est une belle et grande charge mais aussi très exigeante ! Nous sommes responsables d’un peuple que le Seigneur nous confie. Pas seulement des baptisés mais de tous les hommes et les femmes qui sont « comme des brebis sans berger ». Nous avons la triple charge d’enseigner, de sanctifier et de gouverner, c’est à dire de donner à tous la possibilité d’entendre l’appel du Seigneur et de mettre en Lui sa foi. L’évêque porte une responsabilité importante qu’il exerce dans l’esprit que Jésus a donné lors de son dernier repas au cours du lavement des pieds, en nous invitant à être des serviteurs, à donner nous aussi notre vie pour nos frères.
Cette responsabilité, nous ne l’exerçons pas seuls. Dans le diocèse, les prêtres sont nos collaborateurs les plus proches puisqu’ils partagent avec nous le ministère du Christ Pasteur. C’est pourquoi en arrivant à Bordeaux, ma priorité a été de faire connaissance avec tous les prêtres. Mais nous ne pouvons pas exercer notre responsabilité indépendamment du pape et des autres évêques puisque nous portons ensemble le souci de l’Eglise du Christ dans son ensemble. C’est pourquoi nos assemblées plénières deux fois pas an à Lourdes sont des moments essentiels de travail et de communion. Nos visites Ad limina tous les 5 ans à Rome pour un temps d’échange avec le pape et ses collaborateurs est aussi un grand moment de collégialité. Nous venons de vivre la nôtre au mois de septembre dernier.

Pourriez-vous nous présenter le diocèse de Bordeaux (organisation, vitalité, vocations, projets…) ?
Le diocèse de Bordeaux correspond au département de la Gironde. Un million cinq cent mille personnes y vivent et y travaillent. La moitié de la population se trouve dans la zone urbaine de Bordeaux et l’autre moitié dans la zone rurale. C’est le département français qui a la plus grande superficie. Nous avons près de 600 communes. La plus grande partie de la forêt des Landes se trouve sur notre territoire, l’autre partie du département est en grande partie couverte par les célèbres vignobles bordelais mais il y a aussi un peu d’élevage et de polyculture dans le sud-Gironde. Beaucoup de gens travaillent donc dans ces deux filières du bois et de la viticulture mais nous avons aussi des industries dans la zone urbaine de Bordeaux et le long de la Garonne, dont l’aéronautique et le spatial qui tiennent une grande place.
L’Eglise de Bordeaux est donc à la foi urbaine et rurale même si beaucoup de gens habitent la campagne et vont travailler à Bordeaux. Il est plus facile de rassembler les fidèles en ville mais il y a en rural aussi des communautés dynamiques et missionnaires même si les assemblées sont plus modestes. Bordeaux est une ville universitaire, l’aumônerie des étudiants y tient donc une place importante. On peut dire que l’Eglise est dynamique en Gironde malgré le défi que l’on trouve partout d’un manque de vocations sacerdotales et religieuses. Nous pouvons nous réjouir cependant d’avoir accueilli 10 jeunes en première année au séminaire cette année. Nous avons actuellement 28 séminaristes pour le diocèse.

Quels conseils pourriez-vous donner aux jeunes élèves qui vous liront ?
Je vous appelle à développer votre vie spirituelle, à devenir des hommes et des femmes de prière, à fonder votre vie sur le Christ au point de devenir vraiment son ami, un ami sûr qui sera alors comme un pilier solide sur lequel vous pouvez construire une vie heureuse et fidèle. Quelle que soit votre vocation, que ce soit le mariage, la vie religieuse ou la vie de prêtre, il y a un vrai bonheur à grandir dans la foi, à construire sa vie sur l’Evangile. Tous ceux qui en font l’expérience expriment leur joie et leur enthousiasme pour reprendre les mots de Benoît XVI. Notre monde est bien souvent déprimé car il manque de repères, il manque aussi d’espérance. St Pierre nous demande de "rendre compte de l’espérance qui est en nous devant quiconque nous en demande raison". Il parlait alors à des chrétiens qui vivaient dans un monde hostile avec des persécutions violentes. Être témoins de l’espérance que le Christ a mise en nos cœurs, c’est un grand service que nous rendons dans une société déboussolée.

L’Association des Anciens a choisi pour thème cette année : « l’engagement du chrétien dans la vie publique » ; que vous inspire ce sujet ? quels sont, pour vous, les défis prioritaires à relever dans nos sociétés ? Comment le faire chrétiennement ?
En parlant de "vie publique", il faut comprendre évidemment toutes les dimensions de notre vie en société, à savoir la vie personnelle, familiale, les relations de quartier, la vie professionnelle, etc. Le chrétien est soumis aux mêmes défis que n’importe lequel de ses contemporains, et pourtant, il ne peux pas agir de la même façon. Comme nous le lisons dans la lettre de St Paul aux Romains : "Ne vous conformez pas au siècle présent, mais soyez transformés par le renouvellement de votre intelligence, afin que vous discerniez quelle est la volonté de Dieu, ce qui est bon, agréable et parfait" Rm 12, 2. Notre premier engagement est donc de toujours chercher à faire la volonté de Dieu. Cette volonté de Dieu, nous la puisons dans les Écritures grâce à la lumière toujours actuelle que nous donne l’Esprit Saint. C’est pourquoi, l’engagement chrétien commence par une vie de prière et de méditation des Écritures. Une vie de prière et de réflexion personnelles dans le silence de notre chambre mais aussi au sein de la communauté chrétienne car nous avons besoin des autres pour trouver la Vérité. Celui qui vit déjà cela ne peut pas se tromper de route. Il saura quoi faire ou que décider dans toutes les circonstances de sa vie quotidienne. Il aura une boussole fiable pour construire une vie heureuse.

Cependant, le fait de connaître la direction ne suffit pas, il faut aussi prendre les moyens nécessaires afin de trouver la force et le courage de prendre ce chemin et de rester fidèle jusqu’au bout de la vie. Il faut nous engager, donner notre vie comme le Christ et avec Lui ! Il nous en donne les moyens notamment par les sacrements et la force de son Esprit, mais aussi par l’enseignement de l’Eglise. Elle nous donne de bons outils à travers les textes du Magistère, notamment le Catéchisme de l’Eglise Catholique mis à l’honneur en cette année de la Foi et sa version plus accessible le Youcat que le pape avait distribué aux jeunes lors des JMJ de Madrid en 2011. Beaucoup de jeunes et de catéchumènes adultes trouvent aujourd’hui des réponses à leurs questions grâce à Youcat !

Mais le grand défi de l’engagement aujourd’hui me semble celui de tenir dans la durée. Beaucoup ont du mal à dire OUI pour la vie. Cela est vrai dans le mariage qui n’est souvent perçu aujourd’hui que comme une simple reconnaissance de l’amour entre deux personnes. Quand on ne s’aime plus, on se sépare. Le mariage est, nous le savons, bien plus que cela puisqu’il s’agit bien de s’engager pour la vie afin de construire une communauté de vie et d’amour où des enfants pourront grandir et s’épanouir. L’échange des consentements l’exprime de façon très belle : "untel je me donne à toi pour t’aimer dans le bonheur et dans les épreuves tout au long de notre vie". Il s’agit bien d’un don de soi à l’autre mais aussi aux enfants futurs. On ne s’appartient plus, comme l’exprime St Paul : "je vis, mais ce n’est plus moi, c’est le Christ qui vit en moi". Au moment où le mariage est si malmené dans nos sociétés occidentales, il est important de redécouvrir le mariage comme sacrement, c’est-à-dire comme signe efficace de l’amour de Dieu en Jésus Christ. Une communauté d’amour qui ne peut tenir que par la grâce de Dieu et sa force pour vivre les moments de pardon et de réconciliation si nécessaires dans l’existence quotidienne. En fondant une famille, nous participons pour notre part à la création et au dessein de Dieu.

La crise de l’engagement dans le mariage se retrouve dans celle des vocations religieuses et sacerdotales. Le Seigneur continue d’appeler des jeunes à la vie religieuse et sacerdotale et nous sommes témoins qu’un certain nombre d’entre eux entendent cet appel. Pourtant, l’engagement pour la vie fait peur là aussi et sans doute davantage encore. Donner sa vie de cette façon peut apparaître comme une perte de liberté et de sa vie. Mais Jésus a dit "Celui qui perd sa vie pour moi et pour l’Evangile, la trouve". Il y a effectivement un vrai bonheur à s’engager quand on a perçu au fond de son cœur cette joie qui fait prendre conscience que le Seigneur a besoin de nous. "Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime" dit Jésus, et ce grand amour donne beaucoup de joie.

Nous sommes témoins que beaucoup de jeunes aujourd’hui ont un vrai désir de se mettre au service des autres. Certains s’engagent pour des actions ponctuelles ou des services humanitaires de plusieurs mois, mais il y a toujours une peur à donner totalement sa vie. C’est pourquoi il est bon de réentendre l’appel que le bienheureux Jean-Paul II a fait retentir tout au long de son pontificat : "N’ayez pas peur.... "

Propos reccueillis par Xavier Le Saint (promotion 2004)
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